Le secteur des locations de courte durée (STR) en Europe (et ailleurs) fait face à une vague croissante de réglementations qui exige l’attention de toutes les parties prenantes. Même si ces réglementations peuvent sembler de véritables obstacles, elles représentent en réalité une inévitable évolution à laquelle les gestionnaires de biens ne peuvent se soustraire. Les développements récents dans plusieurs villes européennes, d’Athènes à Budapest, révèlent un changement de cap qui impactera la façon dont les gestionnaires opèrent. Toutefois, au lieu d’être source de panique, ces changements sont l’occasion de s’impliquer et d’exercer une influence.
Derniers développements réglementaires : les signes sont là
Au cours des derniers mois, plusieurs marchés clés en Europe ont introduit de nouvelles réglementations qui montrent une tendance claire : la réglementation de la location de courte durée est là pour durer. Par exemple :
- La Grèce a annoncé une interdiction des nouveaux permis de location de courte durée dans le centre d’Athènes, qui prendra effet en janvier 2025. De plus, la fiscalité sur les locations va augmenter de façon significative pendant les hautes saisons, ce qui exercera une pression supplémentaire sur les hôtes. Le gouvernement encourage également les baux de longue durée par des exonérations fiscales pour les logements sortant du secteur STR.
- Dans le district Terézváros de Budapest , un référendum a instauré une interdiction des locations de courte durée à partir de 2026, d’autres districts étant susceptibles de suivre la même voie. Cela s’inscrit dans un débat plus large en Hongrie sur la résolution de la crise du logement par des politiques STR plus strictes.
- Le Royaume-Uni s’apprête à réformer la façon dont les STR sont réglementées. Au-delà des discussions en cours sur les systèmes de licences, un changement majeur est l’abolition du régime fiscal FHL (Furnished Holiday Lettings) en avril 2024. Jusqu’à présent, le régime FHL accordait des avantages fiscaux aux opérateurs STR par rapport aux propriétaires de logements loués à long terme, leur permettant de déduire certaines dépenses et d’être éligibles à des allègements sur les plus-values. La suppression de ce régime traduit la volonté de rétablir une concurrence équitable entre opérateurs STR et bailleurs traditionnels, ce qui oblige les gestionnaires STR à repenser leurs stratégies financières.
- L’Écosse applique déjà un système de licences depuis 2022, et des évolutions juridiques récentes ont amené des autorités locales comme Édimbourg à revoir leur façon de notifier les suspensions aux opérateurs n’ayant pas obtenu les autorisations d’urbanisme requises.
- Les villes à travers l’Espagne—de Pampelune à Barcelone—resserrent l’étau sur les permis de location saisonnière, certaines zones allant jusqu’à interdire l’obtention de nouveaux permis.
- La Belgique, en particulier à Bruges, a introduit des limites strictes sur les permis de location de courte durée dans le centre-ville. Ce site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO prend aussi des mesures pour contrôler l’afflux touristique et la montée des prix immobiliers en interdisant également toute nouvelle construction d’hôtel dans la zone.
- La Tchéquie prépare de nouvelles réglementations STR, avec un cadre national attendu pour juillet 2025. Prague, en particulier, exigera des hôtes qu’ils enregistrent leur logement via une nouvelle plateforme, e-Turista, tandis que des plafonds sur le nombre annuel de jours de location et des limites sur le nombre d’appartements touristiques au centre-ville sont également envisagés.
Ces mesures réglementaires ne sont pas des cas isolés. Elles font partie d’un mouvement général à l’échelle du continent auquel les gestionnaires doivent se préparer.
La réglementation est inévitable – il est temps de s’impliquer
La réglementation n’est plus hypothétique. Elle s’impose rapidement. En tant que gestionnaire de location de courte durée, ignorer ces évolutions n’est pas seulement risqué — c’est manquer l’opportunité d’influencer des politiques qui vont impacter directement votre activité. Plutôt que d’attendre et de réagir, les gestionnaires doivent s’impliquer dès le départ.
En prenant place dans la discussion, vous pouvez faire entendre votre voix lorsque des décisions sont prises concernant votre métier. La réglementation ne signe pas la fin de la rentabilité, mais nécessite de l’engagement. Que ce soit à travers des associations locales ou en collaborant avec des groupes communautaires, le message est clair : agir aujourd’hui permet d’éviter bien des problèmes demain.
Les grandes marques montrent déjà l’exemple
Les plus gros acteurs du secteur, en particulier Airbnb, ont très vite compris l’importance d’influencer l’environnement réglementaire. Airbnb s’est montré proactif et vocal dans sa lutte contre les réglementations trop strictes, non seulement dans les médias mais aussi en mettant en avant sa contribution aux économies locales.
- Airbnb s’est activement impliqué dans l’élaboration des nouvelles règles européennes sur la location de courte durée. Durant les débats réglementaires, l’entreprise a systématiquement publié des déclarations de soutien à une régulation équilibrée et réfléchie qui reconnaît les retombées économiques des STR tout en intégrant les préoccupations des communautés. Airbnb a également fait part de recommandations aux décideurs européens, plaidant pour des règles claires et harmonisées entre États membres, qui selon eux profiteront à la fois aux hôtes et aux collectivités. Sa participation aux échanges sur le Digital Services Act de l’UE, qui comporte des volets sur les STR, illustre sa volonté d’être un acteur de poids.
- Airbnb publie régulièrement des rapports sur l’impact économique, comme son rapport de septembre 2024 indiquant que la location de courte durée a généré 1,4 milliard de dollars à Atlanta à elle seule. Des rapports similaires ont été publiés au Canada, aux États-Unis et en Europe, en mettant l’accent sur le tourisme et la création d’emplois locaux.
- À New York, où la Local Law 18 a imposé de strictes restrictions sur la location de courte durée, Airbnb s’est investi à partager des données pour démontrer que la loi n’a pas résolu la crise du logement mais a contribué à augmenter le prix pour les voyageurs.
- L’entreprise a aussi fondé le Airbnb Housing Council aux États-Unis, visant à s’attaquer aux causes profondes de la crise du logement tout en soutenant une réglementation plus équilibrée.
Les marques de référence comme Airbnb savent que la réglementation est inévitable, mais y voient aussi une opportunité d’influencer la politique. Même si les gestionnaires indépendants ne disposent pas des ressources pour des campagnes d’envergure, il existe des moyens concrets d’agir.
Que pouvez-vous faire, en tant que gestionnaire ?
Pour un gestionnaire de location de courte durée, l’idée de participer à des discussions réglementaires peut sembler intimidante, mais ce n’est pas une fatalité. Inutile de mener une grande campagne : il existe des moyens simples et efficaces de s’impliquer localement.
- Rejoindre un club d’hôtes local: Les Host Clubs Airbnb existent dans différentes régions et offrent une plateforme où les hôtes se connectent, échangent et restent informés des actualités. Ces clubs s’investissent souvent dans l’engagement communautaire et la défense des intérêts, et constituent un bon point de départ pour s’impliquer dans les discussions autour des politiques publiques.
- S’allier aux associations régionales : De nombreux pays européens disposent d’associations représentant les opérateurs STR, comme l’Association of Scotland’s Self-Caterers (ASSC), la UK Short Term Accommodation Association (STAA), ou l’European Holiday Home Association (EHHA). Ces organisations œuvrent à obtenir une régulation juste et proportionnée et disposent généralement de canaux de communication directs avec les décideurs. En les rejoignant, vous contribuez au plaidoyer et profitez de leurs ressources et réseaux.
- Se tenir informé : L’information est une force. Suivre les dernières réglementations et comprendre leur impact potentiel sur votre activité est crucial. Que ce soit via des newsletters, des webinaires ou des réunions locales, rester en veille sur l’actualité réglementaire vous aide à vous préparer.
Conclusion : l’action locale est la clé
Le cadre réglementaire des locations de courte durée en Europe évolue très vite, et il est évident que ces changements sont là pour rester. Pour les gestionnaires de biens, la vraie question n’est pas de savoir s’il faut s’impliquer, mais comment. En adoptant des démarches simples et stratégiques — via une association locale ou un club d’hôtes — vous vous donnerez les moyens de traverser efficacement cette période de mutation.
Uvika Wahi est rédactrice chez RSU by PriceLabs, où elle dirige la couverture de l’actualité et l’analyse destinées aux gestionnaires professionnels de locations saisonnières. Elle écrit sur Airbnb, Booking.com, Vrbo, la réglementation et les tendances du secteur, aidant les gestionnaires à prendre des décisions éclairées. Uvika intervient également lors d’événements internationaux majeurs tels que SCALE, VITUR et le Direct Booking Success Summit.




