Les démêlés juridiques d’Airbnb : hôtes et plateforme confrontés aux amendes, impôts et régulations

Au fil du temps, Airbnb et ses hôtes se retrouvent de plus en plus piégés dans une toile de complexités juridiques. Ces obstacles ne sont pas dans un avenir lointain, mais s’abattent déjà de plein fouet, affectant la plateforme et les hôtes à travers le monde.

Partout dans le monde, les autorités de régulation resserrent leur emprise sur les locations de courte durée. En Australie, Airbnb fait face à une amende de 30 millions de dollars. En Italie, l’entreprise doit s’acquitter de 576 millions d’euros d’arriérés d’impôts sur des réservations passées. À Barcelone et au Royaume-Uni, les hôtes doivent composer avec des amendes ou vivent sous la menace de sanctions potentielles.

Plongeons au cœur de ces problématiques pour éclairer ce que les hôtes doivent savoir afin de construire et maintenir leur activité face à ces défis.

Les défis juridiques persistants d’Airbnb

Litige fiscal en Italie

L’accord à 576 millions d’euros

Selon les procureurs italiens, Airbnb n’a pas respecté une loi de 2017 obligeant les plateformes de location de courte durée à collecter 21 % des revenus locatifs des propriétaires pour le compte des autorités fiscales. Cela a entraîné une ordonnance de saisie de 779,5 millions d’euros auprès du siège européen d’Airbnb en Irlande.

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Airbnb a accepté de verser 576 millions d’euros (621 millions de dollars) aux autorités italiennes, mettant fin à un litige fiscal prolongé. 

L’accord couvre les retenues réalisées auprès des hôtes entre 2017 et 2021. Toutefois, les discussions concernant les obligations fiscales pour 2022 et 2023 sont toujours en cours. En réponse à ce règlement, 

Mesures futures et impact sur les hôtes

Airbnb a annoncé la mise en place de nouveaux outils permettant de retenir automatiquement l’impôt dû sur les revenus des hôtes avant de les reverser aux autorités italiennes. De plus, dès l’an prochain, le gouvernement italien mettra en place un code d’identification national pour les locations de courte durée afin de lutter contre les propriétaires fraudeurs.

Airbnb a précisé ne pas chercher à récupérer l’argent auprès des hôtes et a exprimé l’espoir que cette résolution apaise les tensions avec Rome.

Impact plus large

Cet épisode met en lumière les difficultés auxquelles Airbnb doit faire face avec les régulateurs, particulièrement après le boom du tourisme post-pandémie. D’autres villes comme Florence et Venise ont également imposé des restrictions sur les nouvelles annonces Airbnb en raison d’un afflux touristique massif.

Amende en Australie pour tarification trompeuse

Le problème et la réponse de l’entreprise

Sur sa plateforme australienne, entre janvier 2018 et août 2021, Airbnb affichait les prix avec le symbole « $ » sans préciser qu’il s’agissait de dollars américains et non australiens. Par conséquent, environ 70 000 clients ont été induits en erreur, pensant que les prix étaient en dollars australiens.

Airbnb a reconnu dès le début avoir enfreint la loi australienne sur la consommation dans cette affaire. L’entreprise a attribué ce problème à un bug logiciel qui ne basculait pas par défaut les clients australiens vers la devise locale. 

La société a été condamnée par la Cour fédérale australienne à verser une amende de 15 millions de dollars australiens (10,1 millions de dollars US) pour informations trompeuses ou mensongères. Elle doit également verser jusqu’à 15 millions de dollars australiens en compensation aux clients concernés, avec une moyenne d’environ 230 dollars australiens par client.

Prochaines étapes

Les consommateurs éligibles seront contactés par Airbnb dans les 45 jours à venir et invités à déposer une réclamation. La directrice pays d’Airbnb pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande, Susan Wheeldon, a déclaré que le problème avait été rapidement corrigé par l’entreprise, qui a présenté ses excuses aux clients affectés.

Enjeux juridiques et réglementaires : le point de vue des hôtes

Des propriétaires new-yorkais attaquent Airbnb et des locataires en justice pour infraction à la réglementation sur la location partagée

Deux propriétaires de l’Upper West Side à Manhattan ont déposé des plaintes contre Airbnb et leurs locataires pour violation des restrictions sur la location partagée imposées par la ville de New York. Les propriétaires affirment qu’Airbnb et les locataires ignorent la Local Law 18, qui exige l’enregistrement auprès de la ville pour tout séjour de moins de 30 jours.

La réponse d’Airbnb

L’un des objectifs principaux de la Local Law 18 était de préserver le parc immobilier de New York. Cette loi, adoptée le 9 janvier 2022, exige que toutes les locations de courte durée légales soient enregistrées auprès de la mairie. Son application depuis septembre 2023 a entraîné des changements importants, dont une limite fixant à deux le nombre maximum de personnes payant pour une location de courte durée simultanée, quelle que soit la taille du logement.

Airbnb avait initialement poursuivi la ville en justice pour bloquer l’ordonnance lors de l’adoption de la Local Law 18 en janvier 2022. Mais son action a été rejetée en août.

Une nouvelle enquête commandée par Airbnb suggère que les visiteurs sont moins enclins à voyager vers la ville en raison des réglementations strictes sur les locations de courte durée. D’après ses résultats, davantage de visiteurs pourraient se tourner vers le marché noir pour se loger. La perte potentielle de revenus est également mise en avant, car ces voyageurs pourraient alors préférer loger chez des amis ou de la famille plutôt qu’à l’hôtel. 

À la suite des actions en justice, Airbnb a supprimé les annonces de Dominguez et Dewald. L’entreprise indique qu’elle coopère avec la ville pour faire respecter la loi et compte sur le système de vérification de la ville pour contrôler les hôtes non enregistrés.

Conséquences pour les hôtes

La Local Law 18 a forcé de nombreux hôtes à proposer des locations de 30 jours ou à publier leurs annonces sur d’autres plateformes comme Craigslist et Facebook. Au 9 octobre 2023, la ville avait reçu environ 4 794 demandes de sous-location de courte durée et approuvé seulement 481 candidatures conformes aux règles du bâtiment et d’occupation. Les motifs de refus fréquents incluent la présence excessive d’occupants ou l’absence évidente du propriétaire sur place.

En outre, la Local Law 18 a entraîné la création de catégories entières de logements inéligibles à la location de courte durée. Par exemple, les appartements soumis au contrôle ou à la stabilisation des loyers, ou bénéficiant d’un prêt subventionné et dépendant du département du logement de la ville de New York, sont interdits en location de courte durée.

Conséquences pour les voyageurs

Côté voyageurs, la diminution de l’offre de locations de courte durée signifie moins de choix, souvent plus chers. Ils risquent aussi de devoir passer par de nouvelles annonces sur le marché noir, un choix perçu comme plus risqué que de réserver auprès d’un hôte public évalué sur Airbnb.

La déclaration d’Airbnb concernant la dépendance au système de vérification de la ville pour les hôtes non enregistrés soulève des questions sur ses propres mécanismes de validation à New York. Cela pourrait signifier que de nombreuses annonces restent sur la plateforme sans permis adéquat. Ces annonces non conformes risquent d’être supprimées à terme, mettant les voyageurs ayant déjà réservé dans une position délicate.

Le tour de vis de Barcelone contre les locations touristiques illégales

Amende pour infraction à un propriétaire

Dans une affaire récente, la mairie de Barcelone a infligé une amende de 420 000 euros à un propriétaire pour avoir loué illégalement 14 appartements du centre historique à des touristes, sans licences requises. Les propriétaires, considérés comme récidivistes, commercialisaient ces biens sur des plateformes comme Booking.com et Airbnb.

Ces locations illégales étaient déguisées en baux classiques depuis plusieurs années. La mairie a précisé que cette activité nuisait gravement aux autres résidents du quartier. 

Tactiques de dissimulation

Pour échapper aux contrôles, il a été constaté que les contrevenants désactivaient et réactivaient les profils sous différents noms, photos et hôtes sur les plateformes locatives. Cependant, lors d’une inspection conjointe avec la police locale et l’autorité du quartier historique, il a été constaté que 14 logements sur 15 étaient occupés par des touristes sans licence.

Changements de règles fiscales HMRC pour les hôtes Airbnb au Royaume-Uni

Nouvelles obligations fiscales de la HMRC

Des milliers de Britanniques utilisant Airbnb et d’autres plateformes de location de courte durée pourraient être lourdement sanctionnés suite à un changement de réglementation par HM Revenue and Customs (HMRC). À compter du 1er janvier 2024, ces plateformes devront obligatoirement transmettre aux autorités fiscales les informations de revenus de leurs clients.

Conséquences pour les hôtes

Dans le cadre du régime fiscal Rent A Room du gouvernement britannique, un particulier peut gagner jusqu’à £7 500 par an, exonérés d’impôts, en louant des chambres meublées dans sa propriété. Cela revient à facturer £625 par mois ou £144 par semaine. Si le revenu est partagé avec une autre personne, le montant maximum non imposable est divisé entre deux, soit £3 750 chacun.

Les hôtes doivent savoir qu’ils doivent déclarer ces revenus dès qu’ils dépassent le seuil gouvernemental de £7 500. Le non-respect de cette obligation peut entraîner des amendes importantes. 

Pas seulement un problème Airbnb : un défi pour toute l’industrie

L’essor rapide du secteur de la location de courte durée ces dernières années a entraîné une vague de changements réglementaires destinés à normaliser le secteur et garantir l’équité entre les acteurs. Il faut se rappeler que ces problématiques ne se limitent pas à Airbnb, mais concernent l’ensemble du secteur.

Autant les hôtes individuels que les grandes sociétés s’efforcent de comprendre et de se conformer à ces nouvelles normes. Il s’agit là d’une situation classique dans toute industrie en croissance rapide, mais elle impose aux hôtes une obligation d’actualiser continuellement leur connaissance des réglementations applicables.

Ces obligations peuvent aller des règles fiscales, telles que celles mentionnées dans la directive européenne sur la TVA, aux exigences de reporting telles que celles de la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD). En outre, les exigences en matière de licences varient considérablement d’une ville à l’autre, comme en témoignent les différences entre Barcelone et New York.

Pour les hôtes, se tenir informé de ces évolutions n’est pas simplement utile : c’est essentiel. Les erreurs peuvent coûter cher en amendes ou autres sanctions, et nuire à la réputation. Mieux comprendre l’environnement réglementaire constitue aussi un atout concurrentiel, permettant aux hôtes d’aborder le marché avec plus de confiance et de clairvoyance.