Le 19 août, Airbnb a officiellement annoncé le dépôt d’un dossier en vue d’une introduction en bourse (IPO). Qu’est-ce que cela signifie ? Pourquoi cela devrait-il vous intéresser, en tant que propriétaire, gestionnaire de biens, ou fournisseur du secteur ? Quels sont les signes montrant qu’une entrée en bourse pourrait bien se passer et qu’est-ce qui entretient les doutes concernant l’activité d’Airbnb ?
Airbnb va-t-il entrer en bourse ? Oui, probablement.
Airbnb a officiellement annoncé avoir déposé un dossier d’introduction en bourse (IPO), dans un communiqué de presse très court. Voici l’essentiel de ce message :
« Aujourd’hui, Airbnb a soumis confidentiellement un projet de déclaration d’enregistrement sur le formulaire S-1 à la Securities and Exchange Commission (la « SEC ») concernant le projet d’introduction en bourse de ses actions ordinaires. Le nombre d’actions à offrir et la fourchette de prix pour cette opération n’ont pas encore été déterminés. L’introduction en bourse devrait avoir lieu après la fin du processus d’examen de la SEC, sous réserve des conditions du marché et d’autres conditions. »

Qu’est-ce qu’une IPO ?
Une introduction en bourse (IPO) désigne le processus au cours duquel une société privée propose pour la première fois ses actions au public. La mise sur le marché d’actions permet à une entreprise de lever des fonds auprès d’investisseurs publics.
Quelle est la date de l’IPO Airbnb et le calendrier associé ?
La Securities and Exchange Commission américaine (également appelée SEC) peut prendre d’un à trois mois pour terminer son processus de révision. J’ai lu certains spécialistes financiers qui estiment que ce serait au plus tôt fin septembre, et plus probablement en novembre.
Quelle est la valorisation la plus récente d’Airbnb ? Quelle valorisation pour son IPO ?
En mars et avril 2019, la valorisation d’Airbnb a fortement chuté, à cause du COVID-19 qui a entraîné des annulations massives de réservations et des restrictions de voyage imposées par les gouvernements. Airbnb a alors dû lever des fonds. Cette levée comprenait le droit pour l’investisseur Silver Lake Partners d’acheter des actions selon une valorisation de 18 milliards de dollars, soit une importante décote par rapport à l’évaluation interne d’Airbnb de 38 milliards en 2019.
Selon The Information, Airbnb obtiendrait au moins une valorisation de 30 milliards de dollars lors de l’IPO prévue cette année, soit six fois les 5 milliards de revenus que la société pourrait réaliser en 2022. Les analystes et investisseurs jugent cette valorisation atteignable, car Airbnb mérite un multiple légèrement supérieur sur ses revenus futurs comparé à Booking Holdings, son concurrent coté en bourse.

Pourquoi Airbnb a-t-il besoin d’entrer en bourse ?
– Lever des fonds – Pour investir dans son activité, que ce soit dans la technologie ou dans l’expansion sur de nouveaux marchés.
– Éviter une dette coûteuse – Pour ne pas avoir à contracter des dettes encore plus onéreuses : en avril 2020, quand le COVID-19 ébranlait Airbnb, l’entreprise a réussi à lever 2 milliards de dollars, mais surtout sous forme de dette à très hauts taux d’intérêt (une tranche à 7,5 % au-dessus du taux nominal).
– Satisfaire les employés – Les employés d’Airbnb ont besoin que l’IPO ait lieu en 2020 : de nombreux premiers employés ont reçu des actions de la société. Mais la seule façon pour eux de les échanger et d’en tirer bénéfice est que l’entreprise soit cotée. Si un employé quitte Airbnb, il perd ces actions. Cela signifie que certains salariés historiques attendent depuis des années et ont été vocal sur la nécessité d’une entrée en bourse. À noter qu’en avril 2020, lorsqu’Airbnb a licencié 19 % de ses effectifs, l’entreprise leur a garanti qu’ils pourraient conserver leurs actions non acquises et les vendre, même s’ils n’étaient plus salariés.
Quels signes annonçaient que l’IPO aurait bien lieu ?
Le PDG d’Airbnb, Brian Chesky, a récemment enchaîné les podcasts écoutés par les influenceurs américains (How I built with Guy Raz, How I Built Resilience: Brian Chesky of Airbnb, Andrew Server sur Yahoo Finance, Simon Sinek – How We pivoted Airbnb)
Par exemple, dans cette vidéo, Brian Chesky raconte comment il a fait preuve d’humilité face aux événements, pris rapidement la décision de stopper certaines lignes de produits (exemple : Flights, Plus, Luxe), saisi l’opportunité de pivoter toute la gamme en 14 jours en lançant les Online Experiences, et selon lui, si les voyages vont changer, les réservations sont revenues et Airbnb s’est adapté très rapidement à la crise.
Quels signes montrent qu’Airbnb s’est redressé après la pire phase de la crise du COVID-19 ?
Airbnb a annoncé que le 8 juillet, des clients avaient réservé plus d’1 million de nuitées dans des logements Airbnb à travers le monde. C’était la première fois depuis le 3 mars, soit plus de quatre mois, que ce seuil du million de nuitées réservées en une seule journée était franchi.
Début juillet, le PDG d’Airbnb déclarait : « Entre fin mars et début juin, Airbnb a enregistré plus de réservations aux États-Unis que sur la même période en 2019, et pourrait même dépasser ses objectifs initiaux. Ce n’est pas une reprise totale, mais elle est bien plus rapide que ce que nous aurions imaginé. « Nous sommes au-dessus du niveau de l’an passé, et il est possible de dépasser les prévisions que nous avions avant le COVID. » « Je peux vous dire qu’aucun scénario, ni chez nous ni chez aucun banquier, n’avait prévu une telle reprise, surtout aussi tôt dans l’année. »
Le 23 juillet, le PDG d’Airbnb annonçait que les chiffres 2020 d’Airbnb devenaient comparables à ceux de 2019, tout en ayant drastiquement réduit les coûts, notamment de publicité.
L’entreprise a su adapter rapidement son offre, en mettant en avant les longues durées, en lançant les expériences en ligne et des campagnes marketing pour promouvoir les voyages domestiques.
Dépenses désormais sous contrôle, malgré un effondrement du chiffre d’affaires : Des résultats financiers « fuités » pour le deuxième trimestre 2020 indiquaient que si les revenus d’Airbnb étaient en forte baisse, les réservations repartaient à la hausse. Plus important encore, les pertes de la société restaient contenues : alors que les revenus ont chuté de 67 % au T2 2020 (335 millions de dollars, contre plus d’un milliard), les pertes n’ont augmenté que de 17 % (341 millions au premier trimestre, contre une perte de 292 millions un an plus tôt). Arrêter toute dépense marketing et licencier 19 % des employés et plusieurs centaines de sous-traitants a pu aider financièrement.
Les réservations repartent : Des sources internes évoquent une baisse de 30% des réservations en juin par rapport à l’an passé, contre -70% en mai.
De nombreuses données laissent supposer un solide rebond en juin et juillet. Par exemple, début août, aux États-Unis, le rythme des réservations de locations courte durée pour les 180 prochains jours sur des plateformes comme Airbnb et Vrbo est revenu à 81% des niveaux de 2019, selon AllTheRooms
Airbnb sait aussi qu’il doit résoudre les problèmes récurrents de sécurité. Depuis décembre 2019, la plateforme a commencé à bannir les fêtes dans les maisons. Cet été, elle est allée plus loin, par exemple en refusant aux utilisateurs Airbnb de moins de 25 ans, sans au moins 3 bonnes évaluations, la réservation de logements entiers proches de chez eux, au Canada, États-Unis, France, Espagne et Royaume-Uni.

Quels doutes persistent quant à l’activité et l’IPO d’Airbnb ?
Quelle est la réelle performance d’Airbnb sur les marchés urbains, son point fort historique ? -> La reprise est plus forte dans les marchés régionaux que dans les villes, aux États-Unis comme en Europe.
Vrbo ne se porte-t-il pas mieux qu’Airbnb dans cette reprise ? -> Aux US, le nombre de réservations pour des séjours futurs sur Vrbo a bondi de 61% en juin, comparé au même mois l’année précédente, selon SimilarWeb, une société d’analyse. Cela contraste avec une chute de 16% chez Airbnb. Transparent, société de données sur la location saisonnière, estime aussi que le rebond des réservations mondiales sur Vrbo a été plus rapide que chez Airbnb, après analyse du volume d’avis clients sur les deux plateformes.
Quelle est la situation d’Airbnb sur les marchés internationaux ? Par exemple, Paris est le marché international n°1 d’Airbnb. Comment la plateforme s’en sort-elle, alors qu’il n’y a pas de voyageurs américains et que les clients domestiques préfèrent les destinations rurales ? -> Données BeyondPricing, UK : Le rythme des réservations dans les centres urbains et les villes du Royaume-Uni reste aujourd’hui faible comparé à la même période en 2019, alors que les zones rurales dominent la croissance et le rebond de l’activité de réservation.
Comment Airbnb va-t-il répondre aux préoccupations sur la réglementation locale ? -> Dans les marchés urbains, de nombreuses annonces enfreignent encore la réglementation locale. Le cas récent d’un grand gestionnaire, Domio trompant Airbnb et utilisant plusieurs comptes hôtes pour contourner la réglementation new-yorkaise sur la location ne va pas aider. Il est de notoriété publique que certains professionnels exploitent la fonction Co-Hosting d’Airbnb à New York, Londres ou Paris à cet effet.
Airbnb peut-il vraiment éradiquer les problèmes de sécurité ? -> Entre les fêtes, les fusillades, les caméras espionnant des invités sous la douche ou les dégradations de logements, Airbnb est scruté de près, non seulement pour son modèle mais aussi car il s’agit d’une plateforme de location courte durée.
Airbnb peut-il réellement se recentrer sur les petits hôtes Airbnb ? -> Le PDG d’Airbnb et le nouveau Head of Homes ont promis de revenir à l’essentiel et de cibler les petits hôtes. Pourtant, on peut estimer qu’une part importante des revenus d’Airbnb, surtout dans les grandes villes, provenait avant COVID-19 des gestionnaires professionnels—Airbnb est-il prêt à s’en passer ? Comment la plateforme va-t-elle se positionner face aux marchés de destination, à l’offre et à la demande de Vrbo ?
Pourquoi l’entreprise a-t-elle stoppé sa diversification dans l’hébergement ? -> Airbnb a arrêté d’investir dans Hotels, Airbnb Luxe et Airbnb Plus. Apparemment, Plus et Luxe ne fonctionnaient pas.
Les Experiences ne sont-elles pas davantage une distraction qu’une source de revenus ? -> L’entreprise n’a que 700 expériences en ligne actives, d’après le nouveau Head of Homes d’Airbnb.
Allez-vous acheter l’action Airbnb ?
Alors, en tant que propriétaire de location saisonnière, gestionnaire ou hôte Airbnb, allez-vous investir lors de l’IPO Airbnb ?
Thibault Masson est un expert reconnu en gestion des revenus et en stratégies de tarification dynamique dans le secteur de la location saisonnière. En tant que responsable du marketing produit chez PriceLabs et fondateur de Rental Scale-Up, Thibault aide les hôtes et les gestionnaires immobiliers grâce à des analyses concrètes et des solutions basées sur les données. Fort de plus de dix ans d’expérience dans la gestion de villas de luxe à Bali et à Saint-Barthélemy, il est un conférencier recherché et un créateur de contenu prolifique, capable de rendre simples des sujets complexes pour un public international.




