Booking.com a enregistré l’un de ses meilleurs trimestres de l’année pour la location de courte durée au T3 2025, et ce changement s’est ressenti non seulement dans les chiffres, mais aussi dans le ton de l’entreprise. Lors de la présentation des résultats, la direction a parlé avec une confiance, et parfois une assurance, que l’on n’avait plus entendue depuis un moment. C’est le son d’une plateforme dont les paris à long terme s’alignent enfin avec le marché.
Après des années à être devancé par Airbnb et Vrbo dans certaines régions, notamment aux États-Unis, Booking.com semble entrer dans une phase où des forces structurelles jouent enfin en sa faveur. L’activité d’hébergements alternatifs de la plateforme continue d’accélérer, la notoriété de la marque aux États-Unis progresse, et la stratégie multi-verticale de Booking paraît désormais en parfaite adéquation avec la façon dont les voyageurs réservent.
Voici ce qui sous-tend cette nouvelle assurance.
Les hébergements alternatifs propulsent la plateforme
Booking.com travaille à ce moment depuis plus de dix ans. Bien avant qu’Airbnb ne tente d’intégrer les hôtels ou que Vrbo ne cherche à s’étendre au-delà des maisons de vacances classiques, Booking renforçait déjà toute l’infrastructure opérationnelle nécessaire pour soutenir des millions de chambres et de partenaires dans de multiples catégories.
Son infrastructure, ses partenaires de connectivité, ses équipes multilingues d’approvisionnement, la structuration des données des propriétés, les workflows standardisés de contenus, les hubs partenaires et ses modèles double marchand/agence étaient conçus à l’origine pour les hôtels. Mais l’infrastructure développée pour les hôtels se prête parfaitement à l’échelle de la location saisonnière. Lorsque la demande pour les hébergements alternatifs a recommencé à monter, Booking a pu accueillir cette offre sans grande friction.
Et l’offre arrive bien.
- T1 2025 : réservations AA en hausse de 12 % sur un an ; les AA représentent 37 % des nuitées ; 8,1 millions d’annonces AA au total.
- T2 2025 : nuitées AA en hausse de 10 % sur un an ; les AA représentent toujours 35 % des nuitées totales malgré la forte croissance de l’hôtellerie.
- T3 2025 : annonces AA atteignant 8,6 millions, soit une croissance d’environ 10 % sur un an, et les nuitées AA dépassant à nouveau la croissance globale des nuitées.
Ce schéma sur trois trimestres montre que les AA ne sont pas une simple histoire parallèle. Ils sont l’épine dorsale des performances de Booking en 2025.
Airbnb et Vrbo sont toujours des marques leaders dans la catégorie qu’elles ont contribuée à définir. Mais Airbnb amorce une phase de maturité sur le marché américain, où l’offre et la demande semblent stagner dans certaines métropoles. Vrbo reste fortement attaché à ses atouts historiques : séjours familiaux d’une semaine dans des logements à plusieurs chambres, ce qui rend les changements soudains de durée ou de schéma de voyage domestique plus difficiles à gérer. Booking, au contraire, dispose d’une marge d’expansion à partir d’une base américaine plus faible et d’une présence mondiale bien plus équilibrée.
Le marché américain commence à pencher en faveur de Booking.com
Pendant des années, la présence de Booking aux États-Unis était stable mais sans éclat. Airbnb dominait la culture populaire, et Vrbo s’appropriait le voyage familial. Booking était surtout connu comme une plateforme hôtelière, pas pour la location de vacances.
Cette dynamique est en train de changer.
Le PDG de Booking.com, Glenn Fogel, a mis en avant une vague de notoriété de la marque aux États-Unis ce trimestre, mentionnant notamment des amis lui envoyant des messages après avoir vu des publicités Booking.com lors de grands événements sportifs. Ce n’était pas une remarque anodine. Booking a investi ces 18 derniers mois dans la création publicitaire sur le marché américain : campagne Super Bowl avec les Muppets, spots TV animés par des célébrités, placements stratégiques lors des retransmissions sportives pour reproduire les succès antérieurs de Vrbo avec Nick Saban.
Ces efforts coïncident avec des changements subtils mais significatifs dans la façon de voyager des Américains :
- Les séjours plus courts deviennent la norme, ce qui réduit l’avantage de Vrbo sur les séjours d’une semaine.
- La sensibilité au prix reste forte, et la perception de tarifs élevés chez Airbnb, combinée à la frustration liée aux frais de ménage, n’améliore pas son cas.
- Les voyageurs « flexibles sur la valeur » (notamment les réservations de dernière minute) portent un réel intérêt à Booking.com, car la marque ne véhicule pas la même lassitude envers les frais.
- Dans les villes soumises à forte réglementation (New York, Los Angeles, San Francisco…), Booking reste utilisable grâce à ses hôtels, appart’hôtels et offres hybrides.
Individuellement, ces changements sont minimes. Mais ensemble, ils permettent à Booking.com de gagner des parts de marché aux États-Unis sans devoir nécessairement déloger Airbnb ou Vrbo. Pour les gestionnaires professionnels recherchant la diversification, ces signaux sont pertinents.
L’approche multi-verticale de Booking lui permet de prendre de l’avance
Une autre raison pour laquelle Booking.com se montre plus sûr de lui : c’est le seul acteur de ce trio à opérer déjà un écosystème de voyage mature et totalement intégré sur plusieurs verticales.
- Vols ;
- Hébergements ;
- Attractions ;
- Location de voitures ;
- Transferts aéroport ;
- Paiements ;
- Fidélisation.
Le tout connecté par des années de contractualisation, d’infrastructure data et de logique croisée entre verticales.
Airbnb et Vrbo tentent d’y arriver, mais à partir de points de départ différents, et moins structurés :
- Airbnb a relancé les Expériences, réintroduit les Hôtels, et déployé des Services. L’offre s’élargit, mais avec une prudence de type « pilotage test ».
- Vrbo bénéficie de la puissance du groupe Expedia, mais l’expérience reste dispersée entre plusieurs marques et n’est pas entièrement unifiée dans Vrbo.
L’avance de Booking est importante car les écosystèmes multi-verticaux créent un effet cumulé avec le temps. Lorsque Fogel a évoqué ce trimestre la construction d’« une couche d’intelligence » permettant aux différents éléments du voyage de se relier naturellement, ce n’était pas juste théorique. C’est la continuité de la vision Connected Trip façonnée par l’entreprise depuis des années.
Un voyageur qui commence par une recherche de vol puis reçoit un avantage Genius sur une location de vacances est un voyageur qui pourrait ne jamais quitter l’écosystème Booking. C’est là leur force : la plateforme peut capter la demande par de multiples portes d’entrée et la rediriger vers les hébergements, notamment les hébergements alternatifs.
La fidélisation devient un véritable atout structurel
Le programme Genius est peut-être l’atout le plus sous-estimé de Booking.com dans le secteur STR. Les niveaux 2 et 3 représentent désormais plus de 50 % des nuitées, et ces voyageurs :
- réservent plus fréquemment ;
- annulent moins ;
- ont tendance à réserver en direct ;
- dépensent davantage sur plusieurs catégories de voyage ;
- séjournent aussi bien en hôtels qu’en locations de vacances.
Airbnb ne propose toujours pas de programme de fidélité.
Vrbo fait partie de One Key, mais les récompenses sont relativement diluées pour les hôtes en comparaison des hôtels, et n’offrent pas (encore) le même effet multi-vertical que Genius.
Pour les gestionnaires STR, cela compte. Les clients fidèles de Booking réservent de façon plus prévisible, remplissent la demande de dernière minute et réservent dans différentes régions et saisons. Dans une année mouvementée, la prévisibilité devient un atout concurrentiel.
La diversification protège Booking.com des chocs liés à la réglementation
La réglementation n’est plus un risque de niche. Dans des villes comme New York, Barcelone, Florence, Amsterdam ou Londres, les évolutions règlementaires ont soit restreint l’offre, soit modifié les flux de réservations, soit provoqué de grands changements opérationnels pour les plateformes axées STR.
Booking.com est protégé. Pas totalement, mais considérablement.
Son portefeuille comprend :
- Hôtels
- Maisons d’hôtes
- Auberges de jeunesse
- Chambres d’hôtes
- Aparthôtels
- « Soft hotels » et formats hybrides
- Hébergements alternatifs
Ce mix permet à la plateforme de rester pleinement opérationnelle même lorsque la réglementation sur la location de courte durée se durcit. Dans les marchés les plus réglementés, les voyageurs continuent d’utiliser Booking.com, mais réservent simplement d’autres types d’hébergements.
Cette stabilité aide Booking à maintenir le trafic et les flux de réservation même lorsque l’offre STR fluctue, une résilience qu’Airbnb et Vrbo ne peuvent égaler aujourd’hui.
Les paiements ne sont plus un point faible
Historiquement, l’expérience de paiement d’Airbnb était l’un de ses plus grands atouts concurrentiels : paiements stables, délais prévisibles, solide prévention de la fraude, autant de facteurs créant un climat de confiance avec les gestionnaires professionnels. En parallèle, l’ancien modèle agence de Booking et les particularités régionales des paiements ont longtemps frustré les opérateurs.
Cela change.
Le modèle marchand de Booking couvre désormais près des deux tiers des réservations brutes. L’entreprise l’affirme : les paiements sont un pilier central de l’infrastructure Connected Trip, pas juste un obstacle transactionnel. Pour les gestionnaires professionnels, cela signifie :
- des paiements plus rapides et fiables
- des délais de versement clairs
- des réservations multi-produits plus fluides
- une meilleure gestion des litiges et rétrofacturations
- une intégration simplifiée
Pour les opérateurs auparavant réticents à adopter Booking à cause de ces sujets, ces améliorations changent la donne. Avec de nombreux gestionnaires cherchant à se diversifier et à ne plus dépendre d’un seul canal, le timing de Booking est avantageux.
Cette confiance est logique, et les gestionnaires STR doivent en tenir compte
Le ton plus affirmé de Booking.com au T3 n’était pas anodin. Plusieurs forces se rejoignent simultanément, certaines subtiles, d’autres structurelles :
- les hébergements alternatifs progressent trimestre après trimestre
- la visibilité de la marque aux USA progresse
- l’intégration multi-verticale porte ses fruits sur le plan commercial
- la fidélisation stimule la répétition entre catégories
- la diversification protège face à la volatilité réglementaire
- les paiements sont devenus un atout au lieu d’une faiblesse
Cela ne signifie pas qu’Airbnb s’affaiblit ou que les marchés de Vrbo déclinent. Les deux entreprises ont pris des décisions stratégiques majeures cette année, et elles demeurent des canaux essentiels pour les gestionnaires STR.
Mais Booking aborde 2026 avec une trajectoire plus dégagée qu’elle ne l’a connue depuis des années. Elle peut rivaliser plus efficacement aux États-Unis, convertir la demande mondiale plus efficacement et offrir aux gestionnaires professionnels une clientèle plus stable, diversifiée et fidèle.
Pour les opérateurs, c’est le moment de ne pas ignorer Booking.com. Le paysage OTA évolue, et la dynamique de Booking suggère que son rôle dans la stratégie de distribution va peser bien davantage que ces trois dernières années.
Uvika Wahi est rédactrice chez RSU by PriceLabs, où elle dirige la couverture de l’actualité et l’analyse destinées aux gestionnaires professionnels de locations saisonnières. Elle écrit sur Airbnb, Booking.com, Vrbo, la réglementation et les tendances du secteur, aidant les gestionnaires à prendre des décisions éclairées. Uvika intervient également lors d’événements internationaux majeurs tels que SCALE, VITUR et le Direct Booking Success Summit.




