Le regain d’intérêt d’Airbnb pour faire ses débuts en bourse a récemment volé la vedette dans les médias spécialisés du secteur. La plateforme de location de courte durée a récemment licencié 25 % de son personnel et vu sa valorisation privée chuter de 31 milliards de dollars à 18 milliards à la suite de la pandémie de coronavirus. La prochaine introduction en bourse, qui devrait avoir lieu cet automne, pousse les experts à se demander si entrer en bourse dans une période d’incertitude est la bonne voie pour Airbnb.
À retenir
- La chronologie de l’introduction en bourse d’Airbnb devient plus précise, la société devant apparemment entrer en bourse à une date en décembre 2020, pour une valorisation de 30 milliards de dollars
- Certains commentateurs considèrent que cette introduction en bourse permettra à Airbnb de dominer l’industrie du voyage, avec de nouveaux fonds prêts à être investis, après la quasi-faillite de l’entreprise et son incroyable retour.
- Des personnes comme Dennis Schaal de Skift restent sceptiques à propos d’Airbnb : si l’introduction en bourse a lieu en décembre, alors en novembre, la société devra dévoiler ses véritables performances financières. Pour la toute première fois, les faits et les données seront largement partagés, et non plus soigneusement sélectionnés par Airbnb à travers son talent inégalé pour raconter des histoires.
Chronologie de l’introduction en bourse d’Airbnb : entrée en bourse en décembre pour une valorisation de 30 milliards de dollars ?
Le 2 octobre, Reuters a révélé, selon ses sources, qu’Airbnb souhaiterait entrer en bourse en décembre. L’objectif serait de lever 3 milliards de dollars, pour une valorisation totale de 30 milliards. Cette valorisation serait équivalente à celle de la fin 2019 et bien supérieure aux 18 milliards de dollars qu’Airbnb a obtenus en levant des fonds en urgence au plus fort de la crise du COVID-19, en mars et avril 2020.
Voici la chronologie provisoire de l’introduction en bourse d’Airbnb à ce jour :
- Avril 2020 : Airbnb lève 2 milliards de dollars de dette, pour une valorisation de 18 milliards
- Juillet 2020 : Brian Chesky, PDG d’Airbnb, annonce qu’une introduction en bourse d’Airbnb en 2020 n’est pas impossible
- 19 août 2020 : Airbnb dépose confidentiellement auprès de la SEC sa demande d’enregistrement pour une introduction en bourse
- Novembre 2020 : Airbnb doit rendre publique sa demande d’introduction en bourse, après l’élection présidentielle américaine
- Décembre 2020 : Introduction en bourse d’Airbnb
Que va-t-il changer après l’entrée en bourse d’Airbnb ?
Lorsqu’une entreprise de l’envergure d’Airbnb devient publique, l’impact est forcément d’une grande ampleur. Dans le cas d’Airbnb, l’ampleur de ce changement ne touchera pas seulement les opérations internes de l’entreprise et la façon dont elle interagit avec le public mais, plus important encore, ce moment peut constituer un moteur de transformation profonde pour l’ensemble du secteur.
En tant qu’entreprise privée, Airbnb avait la liberté de maintenir les détails de ses activités à l’abri du regard du public.
Deux experts du secteur, Jennifer Leigh Parker et Dennis Schaal, ont récemment partagé leurs points de vue sur ce que l’introduction en bourse signifiera pour Airbnb et comment elle pourrait impacter l’industrie.
Introduction en bourse d’Airbnb : succès ou échec ?
Jennifer Leigh Parker, contributrice pour Forbes, partage le point de vue des analystes de la tech à Wall Street, qui prédisent que la valorisation d’Airbnb atteindra 30 milliards de dollars lors de l’introduction en bourse. Parker considère l’IPO d’Airbnb comme une première étape vers la domination du secteur. Dennis Schaal, quant à lui, se montre plus prudent.

Le journaliste de Skift doute d’une introduction en bourse spectaculaire pour Airbnb, étant donné que de nombreuses spécificités concernant ses opérations et ses finances restent non divulguées. À l’inverse, Parker estime qu’entrer en bourse et obtenir des financements en cette période de crise permettra à Airbnb de s’imposer comme une force dominante du secteur.
Cependant, Schaal reste convaincu que lorsque Airbnb entrera en bourse, cela bouleversera les règles du jeu pour l’OTA et l’ensemble du secteur du voyage en ligne.
Le premier à se relever dominera le secteur
Avec les restrictions de voyage et les mesures préventives entravant les déplacements internationaux, cette année a vu les « hébergements alternatifs » s’imposer dans le quotidien et, pour certains, devenir un mode de vie.
« Le voyage ne se limite plus simplement au tourisme. Il s’agit aussi de travail à distance, de mobilité économique, de célébrations d’événements marquants, d’intimité, de sécurité et de confidentialité », écrit Parker.
Selon Jennifer Leigh Parker, celui qui rebondira le plus vite après la crise du secteur des voyages en ligne décrochera la plus grande part de marché. Cela a du sens, étant donné la tournure de la pandémie à l’échelle mondiale pour l’industrie du voyage.
L’introduction en bourse d’Airbnb et l’afflux de liquidités qui en découle « permettront à Airbnb de dominer la partie du secteur du voyage qui se remettra le mieux », affirme Parker. Et les données du secteur suggèrent que l’approche alternative d’Airbnb constitue un avantage indéniable.
Une étude récente menée par STR et Airdna montre que dans 27 marchés, les locations de courte durée s’en sortent bien mieux durant la crise que les hôtels. La pandémie a entraîné un changement dans les habitudes de voyage : de plus en plus de voyageurs évitent les destinations traditionnelles et optent pour des options régionales.

Parker estime que le secteur des locations possède deux avantages majeurs par rapport à celui de l’hôtellerie. Premièrement, il s’adapte plus rapidement aux changements dans les comportements de voyage. Deuxièmement, lorsque les restrictions et les mesures préventives rendent difficile les voyages de groupe habituellement associés aux événements, conférences ou festivals, l’important inventaire de locations de courte durée permet d’offrir des alternatives hors des destinations classiques.
« Les locations peuvent aussi procurer un puissant sentiment de liberté et d’autonomie, sans aucun rapport avec les virus. », affirme Parker.
Responsabilité et transparence : une nouvelle ère pour Airbnb ?
Schaal et Parker sont d’accord sur un point : devenir une société cotée va redéfinir la relation d’Airbnb avec le public.
Schaal souligne qu’à la différence des entreprises privées, les sociétés cotées ont l’obligation statutaire de rendre des comptes à leurs actionnaires. Cela signifie que le futur Airbnb devra se montrer plus transparent sur ses opérations. Shaal se réjouit à l’idée de voir Airbnb devoir révéler des indicateurs comme le volume brut de réservations, le chiffre d’affaires, les profits ou pertes, et s’intéresse particulièrement à la transparence sur les dépenses marketing, les procès et acquisitions.

Airbnb va-t-il introduire des programmes de fidélité client ?
Parker suggère que la responsabilité liée au statut de société cotée va pousser Airbnb à encourager la récurrence de ses clients et à récompenser les utilisateurs fréquents, afin de satisfaire les actionnaires.
Cela peut aussi être une réponse aux mesures déjà prises par un secteur en difficulté. « S’il y a bien une chose que l’on sait sur le voyageur moderne à l’ère du COVID, c’est qu’il est bombardé d’offres promotionnelles de tous les acteurs de l’industrie, et qu’il peut trouver des remises importantes plus facilement que jamais », écrit Parker.
« Lorsque les voyageurs se demandent : Je pars en voyage, où devrais-je séjourner ? La réponse (…) sera dictée par la meilleure offre », ajoute-t-elle.
Une nouvelle approche du marketing pour le secteur de la location courte durée
Schaal fait remarquer que par le passé, Airbnb affirmait devoir dépenser moins que ses concurrents en marketing sur Google, grâce à la puissance de sa marque.
Il pense que : « si Airbnb parvient effectivement à se libérer de Google, cela pourrait donner de l’élan et inspirer des concurrents comme Expedia Group, qui considère la réduction de la dépendance à Google comme indispensable ».
Concentration et transparence
Les attentes en matière de transparence pour un Airbnb coté pourraient inciter les concurrents à en faire de même. Les acteurs du secteur, investisseurs et autorités souhaitent accéder à de nouveaux indicateurs concernant la location courte durée.
Dans le même temps, Brian Chesky va devoir faire face à un nouveau paysage de responsabilité publique. Il devra répondre aux experts et critiques, ce qu’il pouvait éviter en tant qu’entreprise privée.
Thibault Masson est un expert reconnu en gestion des revenus et en stratégies de tarification dynamique dans le secteur de la location saisonnière. En tant que responsable du marketing produit chez PriceLabs et fondateur de Rental Scale-Up, Thibault aide les hôtes et les gestionnaires immobiliers grâce à des analyses concrètes et des solutions basées sur les données. Fort de plus de dix ans d’expérience dans la gestion de villas de luxe à Bali et à Saint-Barthélemy, il est un conférencier recherché et un créateur de contenu prolifique, capable de rendre simples des sujets complexes pour un public international.




