Dans quelle mesure les changements remarquables du nombre d’annonces Airbnb sont-ils permanents ?

Depuis plus d’un an, la pandémie de COVID-19 a bouleversé les schémas de demande sur la plupart des marchés mondiaux de locations de courte durée. Par exemple, les destinations littorales, rurales et montagneuses se sont bien portées en Amérique du Nord et en Europe pendant l’été 2020, tandis que les voyageurs ont évité les locations urbaines. Mais qu’en est-il de l’offre ? Dans quelle mesure ce changement de demande a-t-il affecté le nombre d’annonces actives sur Airbnb ? Dans des marchés comme Toronto, Amsterdam ou New York, où le nombre d’annonces disponibles a chuté de plus de 35 %, dans quelle mesure ces changements sont-ils durables ?

AirDNA, un fournisseur de données de référence sur la location courte durée, a publié une analyse approfondie qui apporte des indications saisissantes sur l’impact de la COVID-19 sur l’offre mondiale d’Airbnb.

Après avoir partagé avec vous quelques pépites de ce rapport AirDNA, nous examinerons plusieurs éléments et avertissements quant à la façon d’interpréter les courbes d’offre. Ainsi, vous pourrez consulter les données d’AirDNA et déterminer par vous-même ce qu’elles signifient réellement dans les marchés de location de courte durée que vous connaissez. Combiner de puissants outils de données avec l’expérience du terrain permet aux gestionnaires avisés d’interpréter les tendances du marché et de prendre les bonnes décisions pour s’adapter.

Données les plus frappantes du rapport AirDNA sur l’évolution du nombre d’annonces Airbnb

Le nombre d’annonces actives a retrouvé son niveau d’avant pandémie, mais l’écart avec le nombre d’annonces réellement disponibles s’est creusé : les hôtes garderaient-ils leurs annonces fermées en l’absence de demande ?

airbnb supply growth 2021

Comme l’explique clairement le rapport AirDNA, les données sont basées sur les annonces Airbnb repérées comme actives ou disponibles en février 2021 :

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  • Annonces actives : nombre d’annonces visibles sur Airbnb ayant eu au moins une nuit réservée au préalable.
  • Annonces disponibles : nombre d’annonces actives ayant un calendrier disponible ou au moins un jour réservé dans le mois.

Voici quelques données clés :

  • À l’échelle mondiale, on compte plus de 5,4 millions d’annonces actives sur Airbnb. L’offre d’Airbnb a plus que doublé au cours des quatre dernières années, passant de 2,3 millions début 2017 à aujourd’hui.
  • De janvier à juin 2020, Airbnb a perdu 5 % du total de ses annonces mais a depuis retrouvé une croissance de 2,5 % par rapport aux niveaux d’avant pandémie.

Des baisses majeures du nombre d’annonces disponibles dans les grandes villes. Mais là où le nombre d’ANNONCES ACTIVES diminue, l’offre semble réduite à moyen ou long terme

airbnb supply data 2021 per top cities
  • Comme nous le verrons ci-dessous, il est techniquement simple de fermer temporairement la disponibilité d’une annonce, puis de la réactiver en quelques clics. Une annonce non disponible peut simplement être mise en pause. Mais une annonce inactive est plus proche d’un « désabonnement », signe que le logement quitte Airbnb, voire le secteur de la location courte durée.
  • Les baisses du nombre d’annonces actives ont été plus fortes dans les villes que dans d’autres marchés, par exemple au Canada. Collectivement, Toronto, Montréal et Vancouver ont perdu 22 % de leur offre active sur la dernière année, contre une baisse de seulement 3,5 % pour l’ensemble du Canada.
  • Des villes comme Amsterdam, Copenhague et Oahu devraient voir leur offre rebondir plus vite du fait d’une faible baisse du volume d’annonces actives. Amsterdam est aussi un cas où la réglementation locale a pesé sur le nombre d’annonces : en 2020, les locations à court terme ont été interdites dans le centre-ville, mais cette interdiction vient d’être annulée. Les propriétaires ont probablement rendu leurs logements indisponibles en attendant la fin du contentieux juridique, ce qui s’est ajouté à l’effet de la pandémie sur le nombre d’annonces disponibles.
  • Des marchés comme New York, Toronto ou Pékin affichent un recul marqué des annonces actives ET disponibles, ce qui laisse penser que la baisse pourrait être durable.

Certains marchés sont très demandés, mais ne peuvent pas augmenter leur offre

vacation rental investment market US 2021
  • La différence notable s’observe à l’échelle des marchés. L’absence de demande dans les centres urbains et les grandes villes mondiales a poussé des hôtes Airbnb à cesser temporairement de louer leurs logements ou à les retirer complètement de la plateforme. 
  • L’offre Airbnb continue de se diversifier loin des zones urbaines aux États-Unis, qui représentaient 40 % de l’offre en 2016, contre seulement 20 % en 2021.
  • Marchés contraints par l’offre : Certains marchés sont très demandés, mais l’offre ne peut pas croître, voire se réduit, certains logements étant occupés par leurs propriétaires qui ont choisi d’y télétravailler, et d’autres annonces étant transformées en locations longue durée. C’est le cas en Californie, où des employés de la tech ont quitté San Francisco pour s’installer à Joshua Tree et Lake Tahoe.
  • Marchés difficiles d’accès : Ce sont des marchés avec beaucoup de locations de vacances accessibles principalement par avion (ex : Hawaï, Îles Vierges américaines). L’offre ne peut pas facilement être réorientée, par exemple en habitation classique. Ainsi, beaucoup de propriétaires et gestionnaires ont choisi de fermer leurs hébergements en attendant le retour de la demande.
  • Marchés en forte croissance (ex : Tennessee et Carolines) : ils ont enregistré une demande supérieure à celle de février 2020, mais bénéficient également d’une légère hausse de disponibilité.
  • Des marchés restés attractifs auprès des voyageurs tout au long de la pandémie, comme Myrtle Beach, Tampa, Morehead City/Emerald Isle et les îles Vierges américaines, ont tous connu des hausses significatives depuis le début de la pandémie.

Points d’attention lors de l’analyse de l’évolution de l’offre Airbnb

L’offre peut rapidement diminuer car il est facile de mettre une annonce en pause (« snooze ») sur Airbnb. Elle peut donc « revenir » en ligne en quelques clics.

  • Les personnes extérieures à l’industrie pourraient penser qu’une baisse du nombre d’annonces actives ou disponibles signifie que les propriétaires ont quitté Airbnb définitivement. En réalité, une annonce peut disparaître, puis réapparaître en quelques clics.
  • Comme les gestionnaires de biens le savent, il est très simple de rendre une annonce inactive ou indisponible sur Airbnb (soft churn) sans la supprimer de la plateforme (churn véritable) :
    • Fermez votre calendrier, et votre annonce devient indisponible pour le mois. Il suffit de quelques clics dans le dashboard Airbnb ou dans l’appli.
    • Vous pouvez masquer une annonce jusqu’à 6 mois grâce à la fonction snooze d’Airbnb. Il suffit de changer le statut de votre annonce en « snoozed », et c’est fait. L’annonce sera remise en ligne automatiquement après la période définie.
    • Vous pouvez également changer le statut d’une annonce Airbnb en « unlist ». Pour la remettre en ligne, il n’y a qu’à réactiver la publication via la page « Manage Listings ».
    • Les Channel managers et PMS proposent des options similaires pour masquer ou réactiver une annonce en quelques clics.

Offre : la montée des gestionnaires professionnels face aux hôtes indépendants ?

Selon AirDNA, les opérateurs avec plus de 21 unités ont augmenté le nombre d’unités disponibles de plus de 14 % sur l’année passée, alors que les annonces disponibles des hôtes individuels ont reculé de 9 % sur la même période.

Voici quelques pistes d’explication :

  • C’est dans les zones urbaines que la demande a le plus chuté. Certaines personnes avaient bâti de mini-« empires Airbnb », en pratiquant l’arbitrage locatif sur plusieurs logements ou en co-hébergeant pour d’autres. COVID-19 a fait mal à ces entrepreneurs Airbnb, qui pourraient quitter le secteur. Si la demande revient, ces entrepreneurs et petits investisseurs pourront se positionner à nouveau, mais une partie d’entre eux a été échaudée en 2020 et reste prudente.
  • Les sociétés de gestion sont en général très présentes dans les marchés de location saisonnière traditionnels (mer, montagne et campagne). Avec la hausse de la demande, elles ont pu renforcer encore leur inventaire via d’intenses campagnes de recrutement de propriétaires (voir notre article sur comment Vintory aide les gestionnaires à croître leur portefeuille).

Airbnb souhaite attirer plus d’hôtes individuels, car ils sont en général plus fidèles et parfois même exclusifs à la plateforme. Ils utilisent aussi davantage les outils Airbnb comme SmartPricing, ce qui aide Airbnb à obtenir un meilleur taux de conversion que lorsque les gestionnaires appliquent leurs propres tarifs et restrictions. C’est pour cela qu’Airbnb met l’accent sur sa campagne Made Possible by Hosting et sur son programme Airbnb Ambassador pour dénicher de nouveaux hôtes individuels.

Les règlementations locales peuvent influencer l’offre, à court et long terme

Nous avons déjà mentionné l’exemple d’Amsterdam, où une interdiction à l’échelle locale des locations de courte durée dans le centre-ville a accentué la chute du nombre d’annonces DISPONIBLES. Des propriétaires attendaient le retour de la demande et l’issue du contentieux avec la ville pour trancher. L’interdiction est levée : une partie de ces logements devraient donc redevenir disponibles si la demande repart.

Londres illustre aussi l’impact considérable de la réglementation sur la disponibilité des annonces. Par exemple, en juin 2020, AirDNA rapporte que le nombre d’unités disponibles à Londres avait chuté de 94 %. En cause : le gouvernement britannique avait suspendu toute activité de location courte durée, en raison des mesures strictes de confinement.

top 25 airbnb markets in the world 2021

La demande peut faire remonter l’offre, mais à quelle vitesse ?

  • Les marchés traditionnels de locations de vacances (mer, montagne, campagne) s’en sont bien sortis à l’été 2020, surtout dans les régions bénéficiant d’un marché intérieur apte à compenser l’absence de voyageurs étrangers (ex. : États-Unis, Royaume-Uni, Pays-Bas, France).
  • En 2020 et 2021, les gestionnaires ont tenté d’augmenter leur offre dans ces zones. L’été 2021 devant ressembler à celui de 2020, il est logique de mettre sur le marché plus de chalets, lodges, maisons de campagne ou villas.
  • Cependant, ces hébergements ne se construisent pas en quelques semaines. Le stock supplémentaire reste restreint. Beaucoup de gestionnaires mènent en parallèle des campagnes d’acquisition dans ces régions.
  • Une solution consiste à inciter des propriétaires de résidences secondaires à les mettre en location. Mais en 2021, nombre d’entre eux souhaitent garder leur bien pour un usage personnel, faute de savoir s’ils pourront voyager ailleurs. À Lake Tahoe par exemple, des propriétaires télétravaillent sur place, laissant peu de disponibilités pour les voyageurs en quête d’un airbnb pour la même raison.