Le document S-1 d’Airbnb est publié. Pour la première fois, vous pouvez accéder à des données réelles de réservation, de clients, et d’offre d’Airbnb. Nous avons expliqué à quoi servait le prospectus d’IPO d’Airbnb et pourquoi il mentionne autant de risques d’investissement. Voici maintenant 7 éléments particulièrement intéressants que nous avons relevés pour les gestionnaires et propriétaires de locations saisonnières :
Airbnb veut que les hôtes retombent amoureux de la plateforme

Comme le répètent Brian Chesky, PDG d’Airbnb et Catherine Powell, responsable mondiale des hôtes Airbnb depuis juillet 2020, l’entreprise souhaite replacer les hôtes au centre de sa communauté.
Le document indique : « L’hébergement est la base de l’expérience Airbnb. Airbnb permet à ses hôtes d’offrir aux voyageurs l’accès à un vaste univers de logements et d’expériences uniques auparavant inaccessibles ou même inconnus ».
Le document S-1 d’Airbnb mentionne le mot « Hôtes » 741 fois, dont :
- « Hôtes individuels » 29 fois
- « Hôtes professionnels » 17 fois (Airbnb précise que ce sont les hôtes individuels qui sont au cœur de leur activité, et non les hôtes professionnels)
Les annulations massives et les remboursements forcés de mars 2020 avaient créé un fossé entre Airbnb et ses hôtes. Airbnb a agi pour regagner la confiance de ses hôtes, et d’autres mesures arrivent avec l’IPO :
- Fin mars, début avril, Airbnb a annoncé 250 millions USD pour aider les hébergeurs touchés par les annulations liées au COVID-19 (en remboursant une partie de l’argent des réservations annulées). Un fonds d’aide Superhost de 10 millions USD a également été lancé.
- L’IPO d’Airbnb verra la création du fonds Airbnb Host Endowment. Il vise à soutenir la communauté des hôtes. L’entreprise prévoit d’y injecter 9,2 millions d’actions, distribuées lors de l’entrée en bourse.
- Par le biais de son programme d’actionnariat dirigé, la société compte réserver une portion des actions ordinaires de catégorie A d’Airbnb pour les hôtes éligibles sur Airbnb aux États-Unis. Ces actions seront proposées à certains hôtes éligibles à prix d’IPO, sans frais de courtage, dans le cadre de l’introduction (seuls les hôtes américains sont concernés — 86 % des 4 millions d’hôtes se trouvent hors des États-Unis et l’offre n’est disponible que pour ceux actifs ces deux dernières années).
Airbnb n’a gagné de l’argent que quelques trimestres, surtout au 3e (été en Europe et aux États‑Unis)

Quand on regarde les résultats financiers publics d’Airbnb, on remarque des similitudes et différences avec ceux d’un gestionnaire immobilier :
- En 2017, 2018, 2019 et 2020, les seuls trimestres où Airbnb ne perd pas d’argent sont presque tous au troisième trimestre (juillet, août et septembre). Étant donné le poids de l’Amérique du Nord et de l’Europe dans les résultats d’Airbnb, il n’est pas surprenant de voir que les « meilleurs trimestres » tombent en été.
- Cela montre que l’activité d’Airbnb est très saisonnière. Les gestionnaires immobiliers en seraient surpris, surtout dans les zones balnéaires et rurales.
- Fait remarquable : au troisième trimestre 2020, Airbnb a réussi à générer un EBITDA ajusté positif. Si la demande avait rebondi, cela s’explique aussi par la forte réduction des effectifs et des dépenses marketing du deuxième trimestre 2020.
- Au quatrième trimestre 2020, la même valeur devrait redevenir négative, compte tenu des tendances saisonnières habituelles et de l’impact des confinements en Europe.
La région EMEA représente 40 % du chiffre d’affaires d’Airbnb. Mais le COVID-19 fait croître la part des États‑Unis.

Comparons la répartition géographique des revenus d’Airbnb en 2019 et sur les neuf premiers mois de 2020 (soit avant et pendant le COVID‑19)
De même, sur les neuf premiers mois de 2020, le chiffre d’affaires s’élevait à 1,3 milliard de dollars, soit 50 % du total, en Amérique du Nord, contre 0,9 milliard, soit 34 %, en EMEA, 0,2 milliard, soit 9 %, en Asie-Pacifique, et 0,1 milliard, soit 7 %, en Amérique latine.
- Amérique du Nord : 41 % (2019) -> 50 % (2020 à date)
- EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique) : 40 % (2019) -> 34 % (2020 à date)
- Asie-Pacifique : 12 % (2019) -> 9 % (2020 à date)
- Amérique latine : 7 % (2019) -> 7 % (2020 à date)
Ce changement dans la répartition géographique des revenus illustre la sévérité de l’impact des confinements et des restrictions sur la région EMEA. Par exemple, les voyageurs américains n’ont pas pu venir en Europe depuis mars 2020, alors que de nombreux pays européens comme l’Espagne, l’Italie, la France ou le Royaume-Uni ont mis en place des mesures beaucoup plus strictes que la plupart des États américains.
L’essor du voyage domestique en raison du COVID-19
En 2019, les voyages internationaux représentaient 49 % des nuitées réservées sur Airbnb (donc 51 % des nuitées étaient domestiques, c’est-à-dire réservées dans un pays par des résidents de ce même pays).
Après le début de la crise COVID-19, les voyages internationaux se sont effondrés. Simultanément, les séjours domestiques ont non seulement rebondi mais même augmenté (+28,3 % en juillet 2020 par rapport à juillet 2019). À titre d’exemple, en septembre 2020, 77 % des nuitées réservées étaient domestiques.

Les nouveaux business d’Airbnb n’ont pas décollé. Airbnb Luxe a été arrêté.

Le document S-1 d’Airbnb est très clair sur les activités qui ont été mises en pause ou arrêtées en mai 2020, lors du licenciement d’environ 1 800 salariés :
- Marketing,
- Design,
- Service client,
- Transport,
- Airbnb Studios
- Hôtels,
- et Airbnb Luxe.
L’incursion d’Airbnb dans le secteur du luxe avait commencé avec le rachat de Luxury Retreats, basée à Montréal, et le lancement de la catégorie Airbnb Luxe sur son site. Le S-1 précise qu’en 2019, les dépenses marketing ont fortement augmenté chez Airbnb, notamment pour soutenir le lancement de la marque Airbnb Luxe (avec son propre logo et service client, par exemple).
Après les licenciements, il ne reste plus grand-chose de l’équipe Airbnb Luxe. Quant au site luxuryretreats.com, il n’existe plus en tant que tel et redirige désormais vers https://www.airbnb.com/luxury.
Le symbole Nasdaq d’Airbnb sera ABNB

Airbnb a fait une demande d’admission de ses actions ordinaires de catégorie A au Nasdaq Global Select Market sous le symbole « ABNB ». À garder en tête si vous souhaitez suivre le cours de l’action Airbnb. Préparez-vous à comparer avec :
- BKNG (Booking Holdings)
- EXPE (Expedia Group)
- TSLA (Tesla)
- AMZN (Amazon)
Les fêtes illégales dans les logements : un risque pour les investisseurs

Parmi tous les risques cités dans le document, Airbnb mentionne notamment :
Les actes criminels, violents, inappropriés ou dangereux, ou les fraudes commises par les hôtes, voyageurs ou tiers, peuvent porter atteinte à la sûreté ou à la perception de sûreté de notre plateforme ainsi qu’à notre capacité à attirer et à conserver hôtes et voyageurs, et nuire gravement à notre réputation, à nos activités, nos résultats financiers et notre situation économique. Airbnb a enregistré des pertes nettes chaque année depuis sa création et rien ne garantit qu’elle parviendra à la rentabilité.
Depuis fin 2019, Airbnb a intensifié ses actions pour rehausser la confiance et la sécurité sur sa plateforme. « Airbnb est-il sûr ? » est une question récurrente. Le risque pour les investisseurs est que la multiplication de poursuites judiciaires engendre d’importants coûts, que la réputation d’Airbnb soit entachée, et que hôtes et voyageurs désertent une plateforme jugée peu sûre.
Rappelons quelques mesures prises récemment par Airbnb :
- La liste des normes de fiabilité des voyageurs Airbnb, désormais allongée, comprend de nouvelles règles pour les voyageurs séjournant en Airbnb
- Nouvelles pratiques de propreté et de sécurité pour les hôtes et voyageurs
- Restrictions pour les voyageurs de moins de 25 ans réalisant des réservations de dernière minute dans leur propre ville
Thibault Masson est un expert reconnu en gestion des revenus et en stratégies de tarification dynamique dans le secteur de la location saisonnière. En tant que responsable du marketing produit chez PriceLabs et fondateur de Rental Scale-Up, Thibault aide les hôtes et les gestionnaires immobiliers grâce à des analyses concrètes et des solutions basées sur les données. Fort de plus de dix ans d’expérience dans la gestion de villas de luxe à Bali et à Saint-Barthélemy, il est un conférencier recherché et un créateur de contenu prolifique, capable de rendre simples des sujets complexes pour un public international.




